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ABBA

avril 21, 2010 - Temps de lecture: 10 minutes

De l'ensemble des groupes / artistes qui figurent dans cette série de chronique,  Abba va être le plus dur à défendre. Même si aujourd'hui, le succès indéfectible qui est le leur près de 30 ans après la parution de leur dernier single - Abba ne s'est jamais officiellement séparé - est indéniable, ils trainent une sale réputation dans le monde pop rock  et quand j'achetais leurs albums lors de leurs parutions, il me fallait presque me cacher. Pourtant, côté pop de la force, peu de groupes alignent une telle ribambelle de singles en or massif, les deux garçons avaient ce truc rarissimes de savoir écrire une putain de bonne chanson. Le style musical Europop leur doit quasiment tout et la fin des années 70 ne peuvent être évoquées sans qu'il fassent parti de la bande son. Alors certes, visuellement, kitch, pour ne pas écrire ridicules, ils sont, et même musicalement, dans la valise de tubes, se trouvait parallèlement un paquet de titres pour le moins faiblards, pour ne pas dire de sombre daubes. Reste qu'ils sont l'unique cas d'un groupe non anglo-saxons à avoir un tel succès, et si j'en crois l'arrivée de la comédie musicale Mamma Mia en France à l'automne, la cash machine n'a pas fini de sonner.



Benny Andersson, clavier,  Bjorn Ulvaeus, guitare,  Anni-Frid Lyngstad et Agnetha Faltskog, chant, n'étaient pas des inconnus en Suède lorsqu'ils décidérent d'unir leurs vies et leurs talents. De nombreuses participations des une foultitudes de groupes font qu'il se sont croisés maintes fois avant d'unir leur 4 initiales. Ce premier album paru en 1973 ne pouvait en rien laisser présager de l'avenir radieux qui allait être le leur. Si le titre d'ouverture, Ring Ring, qui donne son nom à l'album est accrocheur comme un titre des Rubettes pouvait l'être, insipide est le terme le plus adéquat pour l'ensemble des autres morceaux. Les deux B n'avaient visiblement pas trouvé la recette. Bjorn chante même un sacré paquet de titres en lead. Fadasse de chez fadasse, le brouet qu'ils nous servent, de l'ordinaire le plus ordinaire. Rien qui ne permette de sortir de Suède.



Et c'est l'Eurovision qui va les sortir de l'anonymat avec le single Waterloo, aussi efficace qu'une campagne Napoléonienne, Blitzkrieg et jackpot à la clef. Waterloo c'est la marque de fabrique du Son Abba. Les voix des filles à l'avant, basse et claviers en avant, guitares quasi absentes. Cette seconde tentative marque un net progrès sur Ring Ring, et il n'y a pas que le single d'écoutable, Honey honey et son refrain accrocheur ,  Dance (While the music still goes on) quasi Motown. Ils s'essaient ,sans grande réussite il faut bien le dire, au rock, avec Watch out ou King Kong (ce dernier est carrément catastrophique). Bref un honnête album de seconde zone d'un groupe de même niveau.



3 ans, 3 albums et cette fois le mélange des ingrédients détonne. Mamma Mia ouvre le disque avec cette magie pop inexplicable, une mélodie à plusieurs étages, d'excellentes idées qui fusent et un hit avec cette pointe d'originalité qui fait penser qu'on tient là autre chose qu'un coup d'un soir. SOS et I Do I do  I do tripleront la mise. Rock me est quasi irrésistible dans le style Bubble gum rock  de l'époque, Bang a boomerang est le style de chanson tout à fait idiote qui finit par vous trotter dans le ciboulot toute la journée et le slow de rigueur I've been waiting for you tient fièrement son rôle. Seul peut être l'instrumental Intermezzo arrive un peu comme un cheveu sur la soupe, la caution intellectuelle ?. Ce n'est pas un disque indispensable, mais un honnête réalisation d'un groupe qui se rêve à pouvoir jouer dans la cour des grands.



Bon, Arrival voit l'arrivée de la grosse cavalerie. La formule commence à être rodée, Benny et Bjorn ont trouvé leur marque et ils cognent fort. When I kissed the teacher met le feu d'entrée, les harmonies vocales, la mélodie scotch, emballé c'est pesé, un tube. Second titre, Dancing queen, dès l'intro piano, c'est dans la poche, une breloque en or de plus à accrocher dans la vitrine. Ajoutez à la collection  Knowing me knowing you et Money Money Money, et comptez moi le nombre de groupes capables de pondre cette impressionnante série sur un même album. Sans compter que les autres titres ne sont pas pour autant du remplissage. That's me à le type de mélodie irrésistible qui font les hits, idem pour le slow My love my life. Dum dum diddle continue de labourer le champ Buggle gum avec efficacité, et même l'instrumental de clôture trouve sa place. 10/10



Enchaîner derrière un tel disque relevait de la gageure. Pari gagné, Abba the album pousse le bouchon un peu plus loin en proposant un album peut être un poil moins ouvertement commercial, quoique, mais sacrément bien ficelé. Eagles en ouverture, et son entrelacs de voix digne des Beach Boys montre qu'Abba est autre chose qu'une machine à singles mais belle et bien un groupe avec un réel univers et quelque chose à dire. Et que dire de Take a chance on me ? Les frères Wilson auraient pu se damner pour un titre comme cela, pour cette imbrication de mélodies toutes aussi redoutablement efficaces les unes que les autres. Cela ne vous suffit pas ? The Name of the game, complexe et pour autant accessible, ou l'hymne Thank you for the music. L'album contient moins de pures hits qu'Arrival mais est tout aussi consistant. NOus commes en 77 et si le punk règné déjà, une autre vague va, commercialement, le balayer, vague sur lesquels nos 4 suedois vont surfer sans vergogne.



En attendant l'album, un single, Summer night city, indique la nouvelle direction prise par le groupe qui prend en route le train du disco. Avec talent certes, mais opportunisme également. Voulez-vous les inscrits définitivement dans cette mouvance. C'est le 1er album d'Abba que j'ai acheté et il tient de ce fait une place particulière pour moi dans leur discographie. Quoique l'empreinte de cette époque marque fortement ce disque, le datant un peu, il reste un sans faute. As good as new démontre simplement que l'on peut faire du Disco intelligement. Quelques cordes, une basse sautillante et un refrain qui vous embarque, first classe ! Le titre éponyme plonge plus avant dans le disco et raffle la mise, une sorte de Saturday night fever suèdois. De la popsong Does your mother know à l'espagnolade Chiquita, tout est ici du niveau des meilleurs ELO et Bee Gees, groupes au style les plus comparables à Abba à mon avis. 10/10 à nouveau



Dans la foulée, avant la parution de Supertrouper, Abba balance la bombe Gimme Gimme (a man after midnight), juste de la pop de haut niveau. A ce moment de leur carrière, les 4 sont intouchables, ce qu'ils touchent se transforme immanquablement en hors. Et Supertrouper confirme. Juste l'intro du morceau titre, a capella, l'entrée de la rythmique, géant. La ballade qui suit, The winner takes it all est simplement sublime. Le disco est nettement en retrait, On and on and on aurait pu faire un excellent Status Quo et tout est à l'avenant, un autre 10/10, quelque soit les styles abordés, le talent de compositeurs des deux B est exceptionnel et leur sens de l'orchestration jamais mis en défaut.



8ème et déjà dernier album, The visitors. Miné par les dissensions internes (les deux couples ont divorcés) le son de l'album s'en ressent, mais pas la qualité. Le disco est loin, l'album est plus sombre, fini l'insouciante adolescence, c'est l'âge adulte. Et l'étrange morceau éponyme marque bien ce changement. Un morceau presque noir, s'éloignant de la pop mais toujours aussi addictif. Une fois encore pas un titre ici n'est ne serait ce que médiocre. Les 4 ont sur dépasser leurs difficultés relationnelles pour écrire l'une de leurs plus belles pages.



Une liste de singles longue comme le bras, des titres qui n'en furent pas mais auraient pu l'être, en 8 albums Abba a marqué la pop de son sceau. 8 ? en fait un 9ème album a été mis en chantier, 6 titres enregistrés, dont 5 firent surface sur les innombrables compils. Et parmi eux probablement le meilleur titres d'Abba The Day Before You Came. Un bijou de chanson, la dernière jamais enregistré en studio par eux. Cassandra, Under Attack et You Owe Me One, autres laissés pour compte démontre que le talent était toujours au rendez-vous